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R.I.P Zelda (extrait de journal)

Dernière mise à jour : 20 févr. 2020



"Mercredi 18 décembre 2019.

Je me réveille, et la première nouvelle que j'apprends, c'est qu'elle est morte 2 jours plus tôt.

Zelda. Thelma. Maia.

Je me suis réveillé, j'ai appris, mon corps à colapsé sans bouger, j'ai lu une tribune, j'ai pleuré.

Je vais écrire au présent pour bien capturer ce moment. Alors écoute bien.

...

Oh putain. Tant de mots se fracasse dans ma tête. Avec les souvenirs. Avec son sourire. Avec ses musiques.

Zelda faisait du rap. Du rap de pute. Zelda faisait des photos, et elles étaient belles, et je me souviens encore de notre shooting, à mes premières putains de rencontres.

Elles les enchaînaient en boucle, cœur dans l'objectif, pour aider toutes les collègues à se faire de belles galeries pour leur taf, en se sentant en sécurité, leur évitant la potentialité de le faire avec un photographe pervers.

Je me souviens de son énergie. Elle était solaire en réalité, parfois glaciale virtuellement, et je connais ça.

Zelda s'assumait, et ça avait été un chemin que j'avais un peu suivi sur internet. Ça n'avait pas été un chemin facile, pas du tout. Mais elle était là. Elle prenait la rue, la peignait, se filmait. "Pute et peintre", je suis là, j'existe.

Elle rapait, elle chantait et les portes lui étaient fermées car elle était pute.

Elle avait l'art en elle. Et elle avait beaucoup d'amour, ça je le jurerais. Et maintenant, elle est juste plus là.

Je vais te dire comment je me sens. Parce que là, ya que du brut en moi.

Pour moi, la mort n'est pas une fin. Alors je crois que Zelda est ailleurs, et sûrement mieux que dans cette dimension de merde entourée d'égoïstes de merde.

Alors une partie de moi est paisible.

Mais il n'y a pas de place pour elle.

Parce que là, si je suis honnête avec moi même, et avec toi par la même occasion : j'ai envie de tout brûler. Envie de brûler le gouvernement, envie de brûler la politique, envie de te brûler, envie de brûler l'espèce humaine.

Je suis en colère. Parce que dans les manifs de putes, on est trop peu. Et qu'on devrait pas l'être. Parce que les putes sont toujours sur le côté. ET PARCE QUE NOS PUTAINS DE VIE SE SUICIDENT À CAUSE DE TON INDIFFÉRENCE ET DE TON INACTION.

Et on va mettre les choses au clair. Ce post n'est pas culpabilisant. Ce post exprime un fait et TU culpabilise.

Nuance.

Parce que ça fait chier, de se lacérer la gueule constamment à savoir si on doit s'exprimer avec violence et honnêteté ou avec pédagogie et patience. Parce que ça fait chier qu'on se fasse toujours reprendre ou invisibiliser. Alors que la vérité : c'est que tu t'en fous !

TU T'EN FOUS.

Tu penses pas ? Tu penses que je projette. Ça marche. Met toi en mode défense-lacheté.

Je vais reformuler en l'exprimant en fait : tu t'en fout trop, au moins à un point où tu ne va pas en manif.

TU T'EN FOUT, AU MOINS À UN POINT OU TU NE PREND PAS TROIS SECONDES DE TA VIE POUR CLIQUER SUR UN BOUTON "PARTAGER".

AH. T'as peur ? T'as honte ?

Tu crois que c'est une excuse ? Tu crois que c'est marrant de voir ses collègues crever parce que t'a peur et t'a honte ? Tu crois que ta peur, ta honte, ou n'importe laquelle de tes excuses merdiques est plus importantes que nos vies ?

Chéri.e, je parle avec mon cœur et c'est mon droit.

Ma collègue est morte. Et pour moi, le monde est responsable.

OUAI.

Parce sa vie avait de la valeur. Parce toutes nos vies ont de la valeur, et qu'on n'y accorde plus autant d'importance ?

Et pourquoi ? "Parce que la vie" ?

Ta gueule. C'est pas la vie qui entraîne la mort.

"Oh tu sais avec le travail et tout"

Ta gueule putain mais ta gueule. On est arrivé.e.s à un point ou ce système de merde, devant lequel on se prosterne parce qu'on le crois essentiel à nos vies, ne prend même plus en compte cette dernière. On est arrivé.e.s à un point où on confond "vie" avec "confort" ou "argent". Et pour garder cela, on a vendu notre cœur.

On a plus rien d'humain.e. On est juste des êtres sociétaux.ales. Économiques.

Voilà ce qu'on est. Et on a peur de l'arrivée des robots.

C'est la guerre dans ma tête. Et en même temps, c'est plus rien. Un désert.

Zelda est morte. Je ne la croiserais plus ici. On meurt, et je ne sais même pas crois écrire, quoi dire, comment être juste ou bien éthique.

Parce que tout ce que j'ai en face de moi : c'est de l'indifférence. Et quand ce n'est pas le cas : c'est de la critique.

Je n'ai pas fini d'écrire. Et je suis trop perdu pour savoir si ce que j'ai écrit est déplacé. Si c'est sale, de mélanger Zelda à ma colère. Je ne sais pas. C'est juste ce que je ressens et je ne veux pas mettre de filtre dessus.

Je ne veux pas de ton ego blessé ni de ta culpabilité. Je ne veux pas de tes mots. Je veux des actes, du soutien concret.

Je veux que tu te bouges le cul et que tu luttes pour qu'on arrête de crever.

Parce que c'est pas du second degré quand je dis qu'on est en train de crever.

Et c'est pas quelque chose de nouveau du tout.

Repose en paix Zelda. Je n'ai aucun doute que tu es mieux qu'ici, c'est pas difficile à croire.

Là où tu es, il ne doit pas y avoir d'insultes, de harcèlements, de violences, d'abolitionnistes, de personnes qui sont sûres de leur certitudes sur un travail qu'elles n'ont jamais exercé.

Là ou tu es, il ne doit pas y avoir cette sensation d'être un.e reclu.e de la société, comme si le plus important était d'être inclus dans cette amas de merde meurtrier. Il ne doit pas y avoir de précarité et de tranche de pain grillé tartinée avec de l'air. Il ne doit pas y avoir de décembre. Et pas d'insultes, toujours pas. Pas de rejet. Pas de regards de haut, de fétichisation, de crachats, d'humiliation. Pas de hontes, de dénonciation, de retraits des enfants. Pas de flics, de gouvernement, de lois, de rejet de la famille. Pas de toute cette liste interminable de tout ce qu'on se prend quotidiennement dans la gueule ici.

J'espère. Je n'en sais rien. Je ne peux que t'envoyer le reste d'amour que j'ai et qui me supplie de sortir de mon corps, car ma colère le brûle.

Ce texte s'envolera vite à l'arrière dans la tête des gens, mais crois moi, je continuerai à écrire longtemps à l'intérieur.

Repose en paix. Repose empouvoirée. Tu as déjà bien illuminé le monde, et mon regret n'est qu'il ne t'ai pas illuminée en retour.

Mais tu sais comment ça marche : iels s'en foutent."


Tu peux trouver mon journal ici.


Prends soin de toi. Et prends soin des gens qui t'entourent. Peut-être, dis leurs que tu les aimes. Ou encore mieux : Montre leurs.


Et n'hésite pas à partager cet article autour de toi.

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